Analyse géopolitique de la capacité stratégique des Houthis en mer rouge
En réponse à la campagne militaire menée par les forces israéliennes dans la bande de Gaza, les Houthis ont attaqué plusieurs navires commerciaux dans le détroit de Bab al-Mandeb dès décembre 2023, fragilisant le commerce international. En retour, les forces américaines ont bombardé des positions stratégiques houthies. Le 6 mai 2025, Trump affirme que les Houthis ont « capitulé ». Cependant, le trafic maritime n'est pas revenu à la normale. De plus, les houthis cotinuent de bombarder Israël. Cet épisode a permis de raffermir la légitimité des autorités houthies sur les zones sous leur contrôle en diffusant la représentation d'une victoire contre les Etats-Unis. Il s'agit dans cet article de questionner la capacité stratégique des Houthis à destabiliser leurs ennemis, à l'échelle régionale et internationale, et de comprendre les répercussions de cet épisode sur la scène politique yéménite.
YEMEN
Eclairage historique : Qui sont les Houthis ?
Les Houthis, de leur vrai nom « Ansaru Allah » (أنصار الله), forment aujourd'hui un mouvement politico-religieux et armé contrôlant le Nord-Ouest du Yémen où la majeure partie de la population yéménite réside. Les membres du mouvement appartiennent à la branche zaydiste du chiisme. La population zaydite est minoritaire au Yémen. Les représentants du mouvement tirent initialement leur légitimation d'un sentiment de marginalisation socio-économique et religieuse partagé par les membres de cette minorité.
Le mouvement Houthi naît dans les années quatre-vingt. Il est à ses débuts un mouvement politique révolutionnaire connu sous le nom de « la Jeunesse croyante » (الشباب المؤمن) et largement influencé par la révolution iranienne d'une part et par « l'éveil islamique » sunnite d'autre part. Avant 1990, le Yémen est divisé entre une partie, la République arabe du Yémen, et une partie sud, la République démocratique populaire du Yémen. En 1990, Ali AbdAllah Saleh, président de la partie nord, et Ali Salem al-Beidh, secrétaire général du Parti socialiste yéménite au sud, unifie le Yémen. Le premier devient président et le second vice-président. Cette unification amène avec elle l'ouverture au pluralisme politique et partisan. Sur cette lancée, l'organisation « Jeunesse croyante » y voit l'occasion de s'organiser politiquement. Elle crée le parti « La vérité » (Al-Haq; الحق).
En 1999, une scission politique apparait au sein de la « Jeunesse croyante » entre Mohammad Azzane et Muhammad Badr Eddine al-Houthi (dont le nom est aujourd'hui donné aux membres de Ansaru Allah) deux figures majeures du mouvement. Hussein Badr Eddine al-Houthi, le frère de Muhammad fonde « L'organisation de la jeunesse croyante » et lui donne une ligne politique radicale. En 2002, cette organisation adopte le slogan encore aujourd'hui scandé « Dieu est grand, mort à l'Amérique, mort à Israël, maudits soient les juifs, victoire à l'Islam. ».
C'est en 2004 que la première guerre des Houthis avec les forces gouvernementales a lieu. Elle est suivie de 5 autres guerres dont la dernière, éclatant en août 2009 dépassera les précédentes par sa violence. Pendant la révolution de 2011 et le chute politique du président Ali AbdAllah Saleh, les Houthis sont en position de force dans le nord-ouest du pays. Cependant, ce n'est qu'à partir de 2014, et grâce au soutien du président déchu Ali AbdAllah Saleh qu'ils asseoient leur contrôle politique et militaire sur le nord-ouest du pays et isntaurent leur pouvoir dans la capitale, Sana'a. Abd Rabbu Mansour Hadi est obligé de fuir. Il se réfugie en Arabie Saoudite, ennemi du pouvoir de Sana'a.
Les Houthis se revendiquent comme alliés de l'Iran. L'Iran leur offre une aide stratégique de taille en leur fournissant des armes, un soutien en formation militaire et en renseignement aisni qu'un appui à la production locale d'armement. Ils se placent donc dans l' « axe de la résistance » (محور المقاومة), aujourd'hui sérieusement mis à mal par la chute de Bachar Al-Assad et les dommages subis par le Hezbollah.